15 aout 2018 - Trirhéna (1/4): GO!
J'en reviens pas... 7h05, il fait doux, il fait jour bien sur... je pédale dans Mulhouse accompagné de la troisième et dernière vague de départ des participants et participantes au Trirhéna.
Jamais j'aurais cru faire ça. Attention hein. Je ne parle pas de finir le Trirhéna. Mais bien uniquement de simplement le commencer. Avoir osé m'y inscrire, c'était un sacré pas pour moi.
C'est que du vélo hein, on n'est pas toujours obligé de tomber dans les grandiloquences - ça ne va pas changer le cours de l'humanité. N'empêche, pour moi, oser me lancer là-dessus, accompagné de cyclistes (pour la très grande majorité plus vieux que moi) chevronnés, des noms que je vois circuler sur internet depuis des années, oser me mêler à ce petit groupe d'anonymes qui partent en vélo explorer le canton du Jura, de Soleure et de Bâle côté suisse, avant d'aller rouler en forêt noire du côté de nos voisins allemands, avant d'aller tâter de la côte Vosgiennes à la limite de la Moselle, pour ne revenir que 3-4 jours plus tard, tout ça en autonomie, à deux roues, et mus par la seule force de leurs jambes (et de leur coeur... on y reviendra)... ça reste quelque chose qui me fiche la peur au ventre, mais qui me rend fier aussi. Ca va être le pied.
L'avantage c'est qu'une fois le coup d'envoi donné, la peur disparait... je retrouve la simplicité du pédalage, les discussions avec les copains puisque le départ est à vitesse modérée pour ensuite lâcher les chevaux à leur propre rythme au bout d'une trentaine de kilomètres. Il n'y a plus qu'une chose à penser, c'est de pédaler, tout en restant sur le bon chemin évidemment.
Section 1: Kingersheim (France) - Les Genevez (Suisse)
- - 249km
- - 5306m de dénivelé positif
- - 12h05 en comptant les pauses
Pour rappel, à chaque section de parcours, reliant les points: départ - ravito 1 - ravito 2 - ravito 3 - arrivée, on peut choisir un parcours avec beaucoup de dénivelé ('light') ou un avec ENORMEMENT de dénivelé ('max'). J'ai choisi de faire le parcours max sur cette première section.
C'est un vrai bonheur d'être accompagné par un 'ouvreur', qui nous oriente sur ces premiers quelques kilomètres. Au moment où je le remercie, il m'indique justement que c'est le dernier kilomètre, et qu'à partir de là, il faut tourner à droite pour prendre une piste cyclable le long d'un canal, et qu'on peut rouler à notre rythme. Bon vent l'ami !
J'ai eu le temps de bien discuter avec Jean Luc, mais très rapidement il part devant. Je reste un peu en retrait, j'économise mes forces dès à présent ! Il part devant et... je ne le reverrais que ce soir au ravito ! C'est un costaud le garçon...
Je me fais piquer à la lèvre par un taon ou une guèpe... la lèvre quadruple de volume en quelques minutes. C'est assez douloureux, mais au bout d'une heure la douleur sera remplacée par une lèvre insensible, simplement difforme. Oh la bonne tête de con que ça me fait.
Bridou m'a doublé vers la fin de la piste cyclable. A la sortie de celle-ci, je récupère David, un cyclo d'Annecy avec qui je vais rouler un bon moment. Il utilise une application mobile pour s'orienter, couplée au road-book, lui donnant les directions à suivre, qu'il a imprimé et fixé sur ses aéro-barres. Ca lui jouera quelques tours: à plusieurs reprises il prendra de l'avance sur Luc, avec qui nous aurons roulé quelques temps (maillot bleu-blanc-rouge), et moi, pour ensuite faire demi-tour plus loin et revenir de derrière. D'ailleurs au cours d'une montée du côté de Bonfol (km 61), il me doublera en me disant qu'il va arrêter 'de faire le chien fou' en accélérant et qu'il va faire un peu plus attention par la suite. Une belle rencontre, un mec très sympa ce David.
Nous passerons 4 fois la frontière: France/Suisse/France/Suisse avant de pénétrer plus loin en territoire helvète. La montée sur le village de Sceut, au kilomètre 88, sera un premier effort conséquent. La pente est longue, en plusieurs palier, et régulièrement au-dessus de 10%. J'ai repris Miguel auparavant, je reviens sur Alain pendant la montée. Arrivée au sommet et photo 'contrôle', pour prouver que je suis passé ici, et que j'ai donc bien respecté l'itinéraire prévu. Reste à me laisser descendre plus en contrebas, où va débuter une nouvelle côte, sur Saint Brais.
Virage à droite et descente magnifique au niveau du Doubs, par le village bien nommé 'les Enfers'. De belles épingles qui s’enchaînent avant d'arriver sur le petit village de Soubey, où le GPS me fait emprunter une toute petite route à gauche, après avoir traversé la rivière. J'ai quelques minutes de soupçons en roulant sur cette route, peur de m'être égaré vu comme la chaussée est étroite... et recouverte de gravillons par moments. Mais bon, c'est bien là que la trace m'emmène alors je poursuis mon chemin à petit rythme.
Nous sommes descendus au niveau du Doubs ? Maintenant il faut remonter sur les plateaux au-dessus... et pour ça, une petite montée sur route isolée dans la forêt, 'made in Bridou'. Pas une seule voiture de croisée, et de beaux panoramas lorsqu'on sort de la forêt. Je roule seul depuis un long moment, et je n'ai toujours pas récupéré Yann parti 5 minutes avant moi.
Après Indevillers, la route va redescendre jusque sur le Doubs. Alain m'avait doublé plus tôt, je le pense arrêté avec ce grand groupe à St Hippolyte, en terrasse à une auberge au bord de la route. Il faut dire que le parcours max rejoint ici le parcours light pour quelques kilomètres, et qu'il y a largement plus de participants partis sur le light que sur le max... donc ici on va croiser du monde.
Je double un des deux cyclos de Rouen, rencontré hier soir. Il roule à son rythme alors je le laisse derrière moi. Le contraire arrive avec un participant allemand. On échange quelques minutes en anglais avant qu'il ne prenne les devants: son rythme est bien supérieur au mien !
La route serpente, tout en ondulations le long du Doubs, et bientôt voici le second point de contrôle. Courte pause pour la photo, et je repars avec un groupe du parcours light, lesquels s'étonnent de me voir bifurquer à gauche après Pont-Neuf - ben oui, ici nos parcours se séparent de nouveau. Je me retrouve de nouveau isolé, plongé dans mes réflexions et mon pédalage. La forme est là, le soleil brille et j'adoooooore jouer à la course d'orientation avec le GPS, à suivre la trace à l'écran dans une région que je ne connais pas.
Il commence à faire chaud, je fais bien gaffe à beaucoup boire, et à manger régulièrement. Pour ça, il suffit d'ouvrir la toute nouvelle sacoche de guidon, où je peux choisir entre gâteaux maisons avec banane-raisins ou pruneaux-noix de coco. Il y a aussi dans la petite poche droite de la sacoche des bonbons de la marque allemande connue, conseil de Yann qui m'aura bien plu pour me 'changer les idées'. Tout ce qui peut rompre avec la monotonie de la solitude à vélo et du faux-rythme pèpère du pédalage au long-cours est bon à prendre !
A Fournet-Blancheroche, une superbe descente m'attends. On retombe une enième fois au niveau du Doubs, pour ensuite remonter. Et là, ça remonte sérieux... montée coriace dans laquelle je souffre... il fait bien trop chaud pour moi et la majorité de cette route ne propose pas d'ombre. Dur dur... en plus un duo de participants me double, ce qui a le don d'ajouter une dose 'mentale' à ce coup de moins bien... même si je sais que ces deux là sont des costauds.
La montée Biaufond-Les Bois laissera des traces. Mais ce qui va laisser encore plus de traces physiques, c'est la très longue approche, casse-pattes, de l'ascension du Mont Soleil. Nous l'avions grimpé lors du BRM 300 - nous allons l'attaquer du versant opposé cette fois.
Je souffre beaucoup de la chaleur, et les jambes sont dejà lourdes... David, rencontré ce matin, me reprend. Nous allons grimper le Mont Soleil ensemble, et retomber sur St Imier, la ville horlogère, avant de faire une pause à la fontaine du village ensemble. Pour repartir de plus belle. Je perds malheureusement me plaque de cadre ici, dommage...
Depuis St Imier, compter environ 800m de dénivelé positif pour atteindre le Mont Chasseral, dernier point contrôle du jour. Nous irons en aller-retour, puisque le parcours repart plein est ensuite... nous repasserons donc à St Imier.
C'est une montée sérieuse qui nous attend, à ne pas prendre à la légère. David prend les devants, normal il est meilleur grimpeur que moi, et largement. Nous croisons ici Bridou, à fond en descente, suivi de peu par Christophe Wolf. Ils ont dejà fait l'aller-retour au Chasseral, j'imagine qu'ils ont donc environ 1h d'avance dejà...
Je grimpe tout doucement, mais c'est encore plutôt du 'contrôle' pour ne pas me cramer qu'une vraie panne sèche. J'ai en plus pu me rafraîchir à St Imier et remplir les bidons, que je me verse de temps en temps sur la tête et dans le dos, pour me tenir au frais. Le coup de chaud, je le redoute presque autant que l'hypoglycémie... je ne suis vraiment pas fait pour rouler par grosses températures, je le sais.
Tiens voilà Jean Luc qui redescend. Il doit avoir 30min d'avance sur moi... mais je ne crois pas qu'il me reconnait alors que je l'encourage.
Arrivé (difficilement) au col du Mont Chasseral, il reste 3km d'ascension en tournant à gauche, pour se hisser jusqu'à l'antenne-relais. Mais c'est beaucoup plus roulant à partir de là, finis les gros pourcentages. Et surtout, le panorama est magnifique... la vue sur le versant sud est à couper le souffle.
Un cycliste en descente vient à ma rencontre... je lui fait des signes d'encouragements avant de reconnaître.... que c'est Didier, avec qui j'ai fait quelques belles sorties en Suisse ces dernières années ! Et il n'est pas là par hasard, il est venu à ma rencontre à vélo depuis chez lui à Lausanne. Le pied. Voilà une belle rencontre, qui change les idées et donne la banane ! On finit la montée ensemble et arrivons à l'antenne. Yipee c'est fait... car j'en ai vraiment bavé dans cette montée !
Je suis surpris de ne pas voir Yann ici. Je ne l'ai pas croisé en montant, ce qui veut dire que soit il a plus d'1h20 d'avance sur moi, ce dont je doute vraiment, soit il est derrière. Et de fait, je le croiserais dans la descente.
La descente passe bien, et fait du bien. Laissant Didier retomber sur le versant sud du Chasseral, moi je retourne sur St Imier. Courte pause pour saluer Yann, qui roule juste devant Alain et Miguel. Puis j'encourage les nombreux autres participants croisés, qui débutent leur montée (dont Valex).
St Imier, reste à bouffer la grimpée du Mont Crosin. C'est le petit frère du Mont Soleil, une montée similaire, sur le même versant de la même montagne, également au départ de St Imier... simplement beaucoup plus facile. Mais ça, je ne le sais pas encore !
Courte pause pour remplir les bidons à la fontaine en face de la gare. Sauf que discutant avec deux gars attablés à une terrasse de bar, j'en oublie de remplir mes bidons et repars avecdes bidons à 90% vides !
Je récupère dans la montée Philippe Dovergne du team Cyclosportissimo, qui est parti une petite heure après tout les participants ce matin. Le col du Mont Crosin (altitude 1227m), je ne l'aurais pas monté vite, mais il ne m'aura pas fait mal au moins !
Descente, puis quelques ondulations pas méchantes après le franchissement du col. La route nous fait passer par Mont Tramelan, avant de franchir une forêt.
Quel bonheur de voir alors apparaître un carré rouge sur l'écran du GPS, quelques kilomètres plus loin, indiquant la fin de la trace chargée dans le GPS !! Car ça annonce la fin de la première section du parcours, et donc le premier ravitaillement à les Genevez. Youhou !
Applaudissements par certains des copains. Je croise Jean Luc qui est sur le point de repartir, dejà. Je mange deux bonnes assiettes de salade de riz, je bois beaucoup, mange une soupe, une banane... un peu tout ce qui me tombe sous la main en fait !
Puis je remplis les bidons d'eau, dont un d'eau gazeuse pour rompre la monotonie de l'eau plate. Mais surtout, j'installe les éclairages sur le vélo, et je remplace la mini sacoche de selle avec kit de réparation et chambre à air de rechange par ma grosse sacoche 14 litres Apidura... je passe donc en mode 'rando au long cours'... je pèse plus lourd et j'ai deja pas mal de bornes dans les jambes... mais ce nouveau départ est l'un des gros moments que j'attendais en venant ici. Je pars pour une nuit sur le vélo, coupée d'une pause 'où je pourrais bien trouver à dormir', probablement sur le bord de route dans la nature. J'ai notamment mon sur-sac de couchage pour ça, dans la sacoche de selle.
Yann arrive alors que je finis de me préparer... il est donc là pour m'encourager alors que je m'élance ! Prochain objectif, le ravito 2 au kilomètre 605 !