Janvier 2017 - Hiver glacial = home trainer
Il est 5h du mat', la sonnerie de mon téléphone portable me tire d'un réveil profond... Immédiatement, je réalise qu'il est plus tôt que de normale...
... et la seconde pensée est immédiatement: VELO ! Voui voui, j'ai mis mon réveil plus tôt que d'habitude pour aller faire du home trainer avant d'aller au boulot. Il faut dire qu'avec les températures négatives, -5°, -8° qu'on a depuis des semaines, je n'ai fait qu'une sortie en extérieur cette année pour le moment ! Ce, surtout que la tradition Velogessien de faire le tour du lac Léman en groupe le premier week end de l'année a été annulée cette année pour cause de météo, routes glissantes et maladie.
Alors pour garder un minimum d'entrainement, et aussi (et surtout) pour me vider la tête de temps en temps, le home trainer chauffe en ce moment ! 6 séances en décembre, 12 en janvier jusqu'à présent.
C'est pas folichon, mais j'adore ça quand même. Oui oui, rien à voir avec ce que j'avais dit avant d'acheter cette machine de torture en novembre 2012. Bien sur, ça n'est pas aussi fun et agréable que le vélo en extérieur... loin de là. Mais en début et fin de saison, c'est une bonne méthode pour s'entrainer, se vider la tête, les jambes et se mettre le cardio au plafond. C'en est devenu mon petit rituel hivernal.
Le mur tout gris sur ma gauche, la voiture sur ma droite, je suis coincé sur ma machine, et il n'y a réellement rien d'intéressant à voir ici. J'adore donner cette description presque glauque du home trainer... car ça me fait sourire intérieurement... c'est la stricte vérité, et pourtant j'aime ça !
Alors ce matin, rituel oblige, je me tire du lit rapidement, avant que le sommeil et la démotivation de me lever ne puissent prendre le dessus. Hop, un cuissard, un maillot long respirant (il fait 6° dans le garage, qui n'est pas isolé), un t-shirt en coton par dessus pour absorber la transpiration. Un bidon d'eau tiède qui sera refroidie au fur et mesure de mes minutes de pédalage dans le 'frigo'. La ceinture cardio et le GPS, pour pouvoir faire des exercices d'intervalles calibrés. Une serviette pour poser sur le cintre devant moi. Et le MP3 - ce matin, ça sera du gros Blaze Bayley sur les oreilles.
Je file dans le garage après avoir avalé un ou deux verres d'eau. Les chaussures vélo aux pieds, je monte en selle. Bip sur le lecteur MP3, bip sur le GPS. Et c'est parti pour 50-60min d'effort intense.
Débuter une séance de 'HT', c'est toujours un peu flippant, car on sait qu'on va se mettre minable. Il y a, du moins pour moi, un réel aspect mental, à accepter que ça va être difficile, et d'espérer qu'à la septième ou huitième accélération de la série, la caboche va accepter le dernier effort demandé, et se tenir à l'intensité attendue sans jeter le torchon. Avec 280 séances de HT sur 6 années civiles sur mon CV, je commence à me connaitre sur ce type d'effort. Il y a presque un côté familier, comme retrouver un ami de longue date ou un membre de sa famille... 'ah oui, c'est vrai, il est comme ça'. Sauf que là, c'est avec cet organe important de mon corps que j'ai rendez vous: mon coeur ! Voui, rien de plus, rien de moins. Car, il faut être précis (et honnête) en 1h de home trainer, les cuisses n'ont pas le temps de devenir réellement douloureuses. Alors que le cardio, lui... il douuuuuuille !
La musique monte en pression, le cardio suit la même courbe. Posé sur un carton juste sur mon côté, le GPS me dispense ses bonnes ou mauvaises grâces. Le seul chiffre qui compte, c'est le pourcentage de ma fréquence cardiaque maximale, affiché en direct. Je suis entre 35 et 45% lorsque je monte sur le vélo, mais très rapidement, je suis à 75-78% Voilà, le corps répond normalement, il a compris qu'il va devoir fournir de l'énergie sur les 50min suivantes.
Argh, voilà deja 10min que je pédale. En comptant sur une durée d'environ 35min d'efforts fractionnés et 10 minutes de 'cool down' (baisse en rythme avant d'arrêter), et étant donné que je ne m'arrêterais qu'une fois que le compteur du HT m'indiquera au minimum 30km simulés parcourus, tout est question de quand je commence les efforts intenses. Alors ce matin, je me suis résolu... à la 16ème minute. Lorsque le compteur indique 15min20, je tombe une dent ou deux, j'accélère progressivement, mais intensément. Le souffle gagne en rapidité et en profondeur. La prise des mains sur le grip du guidon s'affermit. Les cuisses piquent un peu. Et le 'pourcentage' au cardio grimpe en flèche: le but, c'est d'être à au moins 87% lorsque le compteur indique 16min de pédalage. le bruit de lave-linge que fait le home trainer à vitesse soutenue accompagne la 4è chanson du MP3 qui vient de débuter, un fond sonore familier.
Argh que c'est dur. Mais c'est bon, le cardio est à 87% de la fréquence cardiaque maximale que mon coeur est capable d'atteindre. J'ai cette impression familière, elle aussi, que 'jamais je n'arriverais au bout des 3min règlementaires'.
3 minutes, c'est le temps de mon intervalle. A savoir, je devrais tenir ce pourcentage de fréquence cardiaque minimal de 87% (souvent ça oscile plutôt entre 88-89%) pendant 3 minutes. Puis je laisserais le cardio retomber à 81-83% sur 30s, avant de réaccélérer à fond pour que le cardio atteigne à nouveau les 87% après une minute de relâche. Et je ferais cet exercice 6, 7 ou 8 fois, en fonction du temps imparti. Ce matin, ça sera 7... si j'y arrive !
Ouf, enfin un peu de relâche après 3 minutes. Je remets des dents, je relâche toute la tension du corps, je bois même un coup d'eau. Elle est encore tiède après 19min de pédalage... mais ça ne durera pas. A peine le temps d'avoir pu dire ouf et il faut déjà 'remettre les watts', comme on dit dans la langue du parfait petit cycliste.
La tension, la fréquence, le souffle, l'effort, le bruit, reprennent tous en intensité, et à la 3ème ou 4ème accélération, commencent à m'envelopper de leur douce familiarité. L'effort est intense, douloureux, mais aussi rassurant. C'est mon terrain de jeu, je 'joue à domicile'. Je ne pense qu'à moitié à la journée de boulot qui m'attend, à l'heure matinale qu'il est, à la course que ça va être de devoir petit-déjeuner, prendre une douche, m'habiller et filer tête la première dans les bouchons de Genève un matin en semaine - j'ai la tête réellement dans l'instant présent.
Des volutes de vapeur s'élèvent de mes bras, de mon torse - je les observe distraitement entre deux gouttes de sueur qui tombent de mon front en me piquant les yeux. Là encore, j'apprécie le moment, je maitrise la situation autant que possible ; le simple plaisir de dicter à mon corps le niveau d'intensité exigé.
Les dernières minutes du dernier intervalle me mettent au supplice. Mais je fais de mon mieux pour tenir le 'pas moins de 87% de FMAX' établi ce matin. Puis enfin, me voici sur la fin... le cardio retombe presque immédiatement à 82-83%... le coeur doit être un organe qui a la tête dure comme moi, puisqu'au début il met longtemps à s'aligner sur le niveau d'intensité, mais au bout d'un moment il réagit au doigt et à l'oeil, monte et descend dans les tours en parfaite synchronisation avec les accélérations et ralentissements apposés aux pédales.
Pour retomber à 80%, puis 78%, il lui faudra plus de temps, j'ai du mal à le calmer. C'est qu'après l'intensité des dernières 45min, il ne doit pas comprendre pourquoi tout se calme soudain. Voir même, il en garde sous la pédale ("sous la pédale" ahah) au cas où j'allais le surprendre par une dernière accélération... il ne me fait pas confiance le sagouin.
Bip - 30km pédalés, c'est fini. Je descend du vélo, reprend mon souffle appuyé sur le cintre. Je termine mon bidon d'eau, éteint le lecteur MP3, le GPS, m'essuie la tête et les bras.
Une séance de HT matinale comme ça, ça se termine réellement en milieu de matinée, lorsque les collègues arrivent au bureau. Moi j'ai deja fait 1h de sport, suis parfaitement réveillé et éveillé, et j'ai même commencé à bosser depuis un moment.
La recette d'une journée réussie.